Nouna c’est

Nouna c’est New York, ou plutôt Manhattan, avec des rues toujours toutes droites, perpendiculaires. Impossible de s’y perdre !

 

Nouna c’est Jérusalem, une ville des trois religions : Chrétiens, Musulmans… et Animistes ! Sauf qu’en plus ils s’entendent parfaitement entre eux, se convertissent à peu prés librement, et se respectent totalement. J’avais le plaisir d’habiter et de travailler dans le quartier musulman : je pouvais apprécier l’appel a la prière a tout moment, alors que ce qui réveille mes amis habitant dans le quartier catholique, ce sont… les cloches ! Dans les villages, c’est la même chose, il y a parfois des villages plus catholiques, d’autres plus musulmans (et certains surtout animistes) mais en général il y a les trois religions, et au moins une église et une mosquée.

Nouna c’est Paris, il y avait même ses Champs-Elysées, la rue principale, animée – et éclairée ! – à toute heure.

Nouna, c’est Tombouctou, c’est Vancouver, c’est la ville perdue au bout d’une piste, âpres laquelle il n’y a plus rien. C’est un bout du monde, et des plus charmants.

Nouna, c’est n’importe quelle ville d’Autriche : la mer, les gens ne l’ont jamais vue ; et les seuls étrangers qu’on y trouve, ce sont des Allemands.

C’est Bankoumani, Boron, Dara, Denissa Marka, Denissa Mossi, Goni, Kamadena, Sobon, Toni, tous ces villages où j’ai passé beaucoup de temps. C’est la voie de Goni, la pire du monde, sur laquelle j’ai été tellement secoué. C’est Dara et ses « cadres », ses fonctionnaires, qui permet au village d’être beaucoup plus développé que les autres, d’avoir une bonne route, et de piquer des terres aux autres villages. C’est Boron dont j’ai déjà beaucoup parlé, entre ses autels et son bois sacré.

C’est le boutiquier qui m’accueillait à chaque fois avec le plus grand sourire du monde même lorsqu’ il avait l’air de mauvaise humeur.

C’est les gens de l’Auberge, le maquis principal, toujours hyper désagréables quoiqu’il arrive, et qui ont rarement des verres (on boit a la bouteille donc).

C’est la fille à qui j’achète du crédit pour téléphoner à chaque fois, et qui m’a dit ce soir qu’elle voulait qu’on devienne amis, malheureusement c’est un peu tard !

C’est des tas d’autres commerçants plus ou moins adorables qui, a chaque fois que j’avais été absent 5 ou 6 jours (souvent parce que je voyageais) me lançaient un « a fait deux jours ! » (à traduire par « ça fait un bail », « ça fait longtemps »).

C’est les femmes de ménages du Centre que je voyais tout le temps parce que je reste tard au bureau a bloguer notamment, et qui me faisaient toutes les formules de salutation en dioula ponctuées de rires (encourageants, pas moqueurs) a chacune de mes réponses.

C’est Lamine, un jeune enquêteur de l’IRD, qui était souvent le seul à rester aussi tard que moi (parfois presque minuit) lorsque je m’occupais d’inscriptions a l’université et qu’il essayait de faire son travail de supervision dans les délais impossibles qui lui avaient été accordes.

C’est Ali, un autre enquêteur, gentil mais un peu collant !

C’est Casimir, le gestionnaire absolument adorable et toujours souriant, ainsi que sa secrétaire Valérie, malgré les problèmes d’argent ou de logistique récurrents qu’Anatole et moi leur apportions !

C’était ma p50 (j’ai du mal à croire que c’est toujours la même que celle que j’avais a Ouaga !), que j’adore et que je déteste pour toutes les fois ou elle m’a transporte et toutes les fois ou elle ne m’a pas transporte !

C’est l’hôpital (CMA : Centre Médical avec Antenne chirurgicale) que j’ai fini par bien connaitre, à force ! (à la fin je ne me perdais même plus entre les différents bâtiments).

C’est le « restaurant new forest », appelé plus communément « l’environnement » (car c’est le resto de l’antenne du ministère du même nom), où je mangeais presque une fois par jour, et où les serveurs ont été d’une égale inefficacité en trois mois et demi, ce qui me faisait beaucoup rire et beaucoup râler les Burkinabè. C’est donc riz sauce / riz gras / tô le soir, et parfois aussi haricot (et donc aussi mélange = riz gras – haricot) / haricot vert / ragoût (d’igname) / fonio / couscous arabe (et je crois que c’est tout en cette saison en tout cas).

C’est Yves qui m’offrait des poules, dont une encore aujourd’hui que j’ai donné à Anatole pour qu’elle fasse des poussins, pour le plus grand bonheur de mes amis végétariens et/ou soucieux de la vie des animaux comestibles.

C’est la cathédrale de béton, pas si moche en fait. J’aurais beaucoup aimé monter au haut de son clocher pour avoir une vue sur la ville. Une prochaine fois.

C’est les tas de petites mosquées traditionnelles en terre.

C’est Rachel, c’est Mariam, c’est Maïga, Cissé, Zacharia et Sylvain, c’est Marie, la femme d’Anatole, et leurs petites, Rosa et Laeti ; et des tas d’autres gens évidemment ; et des tas d’autres choses.

C’était la Tabaski, c’était Noel avec les filles.

C’est Louis.

C’est Anatole.

Et c’est presque tout ce blog.

 

Voila. C’était a l’occasion de mes dernières 48h a Nouna. M’étant rendu compte en parlant avec Kathrin qu’il me restait moins d’une semaine au Burkina. Et moins de 48h a Nouna. Ce qui veut dire aussi moins de 48h avant de déguster des pates a la carbonara et une mousse au chocolat (a Ouaga) et moins d une semaine avant de me goinfrer de fromage et de saucisson ! Préparez vos frigos, remplissez vos placard, je m apprête à tout dévaliser en toute légitimité !

A l’heure où je peux poster cet article, il me reste à peine plus de 12h. Nous sommes jeudi 12… ce qui veut dire qu’en toute logique, demain c’est vendredi 13. Jour de malheur parce que je quitte Nouna, mais de bonheur parce que je vais faire un trajet sans incident ? Ce qui n’est pas quelque chose de si évident avec LTI (Liza Transport International, s’il vous plait).

Ne pas lire ce message avec un ton nostalgique : je voulais seulement rappeler tous les bons (et moins bons !) souvenirs qui me lient à cette charmante petite ville.

Et puis de toute façon… I will be back !

Nouna, c’est surtout le marchand de yaourt peul (le marchand, pas le yaourt, même s’il vient des vaches des Peuls) qui m’en offrait systématiquement un avant chaque commande, discutait un quart d’heure de tout et de rien, et m’a finalement donne une photo.

12 réponses à “Nouna c’est

  1. Coucou Quentin,

    Peu de temps en ce moment, je t’écris bientôt j’éspère, bon courage pour ton premier mouvement, j’ai hâte de te retrouver!
    Profite bien !!!
    BISOUS!

  2. On sent quand même un peu de nostalgie de quitter Nouna . quelques jours à Ouaga te prépareront au grand retour . Esperons que tu auras le colis avant ton départ
    bises

  3. bon retour parmi nous !

    et à bientôt j’espère.

  4. Nouna, c’est également nous !

    Nous qui scrutions nos écrans, jour après jour, bien à l’abri des moustiques, attentifs à toutes tes découvertes, tes coups de coeur, de ta santé, de tes amis…

    Anatole, par exemple, auquel je me suis bien attaché !

    Voilà, un petite larme s’évapore lentement au coin de mon oeil…

    Merci pour tout, merci à Nouna et au Burkina.

    Maintenant je suis intimement persuadé que j’irai le visiter un jour ! (avec toi ?)

  5. Belle ode à la différence et au bonheur de découvrir les autres. Pour moi c’est certain que tu as devant toi une belle vie de partage et d’amitié !

    Puisse t’on rester en contact comme deux visiteurs du Burkina qui le garde au fond d’eux comme un joyau précieux !

  6. Pour nous, Nouna c’est aussi les bougainvilliers de ton jardin, les raccourcis a travers les champs, le dolo, le quartier fantome plein de trous, le premier gateau a la banane, le foie gras au petit dejeuner, l’enfant au djembe, Anatole, Marie, Rosemonde, Laeticia, le chaton et le chiot (pour enumerer toute la famille!), c’est parler de Coca-Cola et de virgules, c’est les charrettes a deux anes et les beaux murs, c’est ce Noel chaud, kitsch et chaleureux, c’est la recherche au lait d’ou tu es sorti victorieux, c’est encore un verre d’eau, c’est tes histoires, ta ‘zone’. Bref, c’est toi, ‘l’homme de Nouna’ comme t’appelle (notre) Cisse.

  7. Quel beau texte et quelle émotion. Non, ce n’est pas de la nostalgie mais la fin d’un moment de ta vie dont, apparemment, tu as pu suffisament profiter pour écrire d’aussi belles choses, sans non plus perdre tes nerfs cad sans oublier d’évoquer les pates et le chocolat !
    A bientôt et profites bien de tes dernières heures africaines !
    BISOUUUS !!!!

  8. Merci pour vos visites et commentaires à tous. Et à très bientôt !

    Merci pour ces ajouts Alix ; malheureusement le chiot (nommé « Délégué » parce que c’est le délégué de Boron qui le lui avait donné) est mort, on ne sait pas trop pourquoi. La (vraie) famille va bien, elle.

  9. Hello
    Cool comme première impression de Nouna.
    Reviens encore un de ces jours nous revoir.
    Bye

  10. Bonjour Alphonse,

    Merci pour ton message ! Tu es de Nouna ? Ou tout simplement au Burkina ?

    « première impression » mais de plusieurs mois quand même ! Mais oui, « première », parce que j’espère bien y revenir un de ces jours !

  11. C’est très gentil de parler comme ça de ma ville natale
    Merci et beaucoup de courage!!

  12. que tu es génial et poétique?merci d’avoir bien décrit ma ville natale

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